Darmowe ebooki » Tren » Thrènes - Jan Kochanowski (gdzie czytac za darmo ksiazki txt) 📖

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IdĹş do strony:
class="verse">Apaisez un instant mon esprit affligĂ©, 
Tant qu’en un froid rocher je ne suis pas changĂ©, 
Versant des pleurs de sang Ă  travers cette pierre 
Au cruel souvenir de ma douleur de père. 
Est-ce erreur? ou l’aspect des souffrances d’autrui 
Nous laisse-t-il plus froids que notre propre ennui? 
Ă” mère malheureuse (en effet qui s’abuse 
Soi-mĂŞme, c’est toujours le malheur qu’il accuse), 
Tes filles et tes fils que sont-ils devenus? 
Qu’as-tu fait de ta joie? HĂ©las! je ne vois plus 
Que deux fois sept tombeaux; et toi, dĂ©sespĂ©rĂ©e, 
Tu voudrais de ta vie abrĂ©ger la durĂ©e; 
Tu presses de tes bras ces marbres, sous lesquels 
Ta main de tes enfants mit les restes mortels. 
Telles gisent les fleurs que la faux a tranchĂ©es, 
Ou qu’au milieu des champs la tempĂŞte a couchĂ©es. 
Quel espoir te fait vivre? et qu’attends-tu du sort? 
Que ne fuis-tu plutĂ´t ta douleur par la mort? 
Que fait ton arc? que fait ta flèche vengeresse? 
Ă” PhĹ“bus! et toi frappe, Ă´ cruelle dĂ©esse! 
Par courroux pour son crime, ou sinon par pitiĂ©, 
Achevez NiobĂ©, qui ne vit qu’à moitiĂ©. 
Un nouveau châtiment a sa faute expiĂ©e: 
Elle s’est en pleurant ses morts... pĂ©trifiĂ©e. 
Sur le Sipyle elle est debout, marbre Ă©ternel; 
Mais sous la pierre vit son dĂ©sespoir cruel. 
Ses larmes de douleur transperçant la montagne 
En limpide ruisseau tombent dans la campagne; 
L’oiseau, le fauve y boit: elle est lĂ  s’élevant 
Ă€ l’angle du rocher, triste jouet du vent. 
Ă” sĂ©pulcre vivant, Ă´ mort sans sĂ©pulture! 
Toi-mĂŞme es ton cercueil, vivante est ta blessure! 
 
Thrène XVI
Je cède au mal, je cède Ă  la nature. 
Le corps brisĂ© par ma longue torture, 
Je ne puis plus ni chanter ni gĂ©mir 
Mieux vaut mourir! 
 
Suis-je vivant ou quelque horrible songe. 
S’élance-t-il de mon cerveau qu’il ronge, 
Pour dĂ©cevoir mon esprit et mon cĹ“ur 
De son erreur? 
 
Sottise humaine, orgueilleuse folie! 
Dans ses pensers comme l’homme s’oublie 
Quand rien ne vient rabattre son orgueil, 
Malheur ni deuil. 
 
La pauvretĂ© nous plaĂ®t dans la richesse. 
Dans le plaisir nous bravons la tristesse; 
Chacun de nous, tant qu’il est jeune et fort, 
Rit de la mort. 
 
Mais quand survient le deuil ou la misère, 
Parler est un, vivre est une autre affaire; 
Et quand la mort frappe notre regard, 
Il est trop tard. 
 
Ă” CicĂ©ron, pourquoi lorsqu’on t’exile 
Verser des pleurs? que t’importe une ville? 
Notre patrie est le monde, as-tu dit, 
Sublime esprit! 
 
Ta fille est morte; et pourquoi donc te plaindre. 
Le dĂ©shonneur n’est-il plus seul Ă  craindre? 
Ne faut-il plus accepter le malheur 
La joie au cĹ“ur? 
 
La mort, dis-tu, ne fait peur qu’à l’impie. 
Et pourquoi donc dĂ©fendis-tu ta vie, 
Quand on voulut pour un mordant discours 
Trancher tes jours? 
 
Console-toi, puisque tu nous consoles. 
Tu ne fus donc sage aussi qu’en paroles, 
Parleur divin? Tu souffres, je le voix, 
Autant que moi. 
 
L’homme est de chair: seule la destinĂ©e 
Rend notre vie ou triste ou fortunĂ©e. 
Ă” sort maudit! Mais c’est se torturer 
Que de pleurer! 
 
Temps, de l’oubli loi qu’on nomme le père, 
Ce que n’ont pu ni raison ni prière, 
Calme mon deuil et chasse ma douleur 
Loin de mon cĹ“ur. 
 
Thrène XVII
La main du seigneur me foudroie, 
Il m’enlève toute ma joie; 
Le souffle Ă  peine m’est restĂ©, 
Et bientĂ´t il m’aura quittĂ©. 
 
Que le soleil brillant se lève 
Ou que sa carrière s’achève, 
Toujours Ă©gale est ma douleur, 
Rien ne peut apaiser mon cĹ“ur. 
 
Jamais ne finit ma tristesse, 
Il faut gĂ©mir, pleurer sans cesse. 
Il faut pleurer; Ă´ Dieu des cieux, 
Qui peut se soustraire Ă  tes yeux? 
 
Nous craignons de voguer sur l’onde; 
Nous fuyons le canon qui gronde; 
Et les maux viennent nous frapper 
Quand nous croyons leur Ă©chapper. 
 
J’avais cachĂ© dans la retraite 
Mon existence humble et secrète, 
Et mon toit par l’adversitĂ© 
Ne pouvait ĂŞtre visitĂ©. 
 
Mais la sagesse souveraine 
Se rit de la prudence humaine, 
Et m’a frappĂ© d’autant plus fort 
Que plus je dĂ©fiais le sort. 
 
Et mon esprit dont la jactance 
Parlait si haut de sa constance, 
Se connaĂ®t Ă  peine aujourd’hui, 
Bien loin de me servir d’appui. 
 
Parfois pourtant il se redresse 
Et cherche Ă  calmer sa tristesse; 
Mais que peut son faible secours? 
Mes chagrins l’emportent toujours. 
 
En vain notre âme s’évertue 
Ă€ nier le mal qui la tue; 
Et rire dans l’adversitĂ© 
N’est que folie en vĂ©ritĂ©. 
 
Cacher nos larmes sous le rire! 
J’entends ce que vous voulez dire: 
Mais par lĂ , loin de s’en aller, 
Le deuil ne fait que redoubler. 
 
Le mal dont mon âme est atteinte, 
Ne se calme que par la plainte. 
Mais la faiblesse est un malheur, 
La honte aussi blesse le cĹ“ur. 
 
Par le ciel! Le triste remède 
Pour celui que le deuil obsède, 
Ă” mes amis, nul d’entre vous 
N’en peut-il trouver un plus doux. 
 
Laissons s’exhaler ma souffrance, 
Car j’ai perdu toute espĂ©rance; 
La raison n’a pu me guĂ©rir, 
Dieu seul pourra me secourir. 
 
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Thrène XVIII
Enfants ingrats d’un si gĂ©nĂ©reux père, 
Quand pour nous tout est prospère, 
NĂ©gligeant de te bĂ©nir, 
Nous ne pensons qu’à notre seul plaisir. 
 
Nous oublions qu’il nous vient de ta grâce, 
Et que vite il fuit et passe 
Lorsque pour de tels bienfaits 
Un cĹ“ur lĂ©ger ne te bĂ©nit jamais. 
 
Ă” guide nous! Loin de nous les chimères 
Des vains plaisirs Ă©phĂ©mères: 
Et fais-nous penser Ă  toi 
Ou par l’amour ou sinon par l’effroi! 
 
Mais punis-nous, oh! punis-nous en père! 
Nous fondrons sous ta colère 
Comme la neige au printemps, 
Quand le soleil darde ses traits ardents. 
 
Nous pĂ©rirons tous, Ă´ Dieu redoutable, 
Si ta foudre nous accable 
Sous le poids de ton courroux. 
Non, ce supplice est trop cruel pour nous! 
 
Mais notre espoir sur ta bontĂ© se fonde; 
On verra pĂ©rir le monde, 
Avant que le repentir 
Perde, Ă´ seigneur! le droit de te flĂ©chir. 
 
De mes pĂ©chĂ©s si le torrent dĂ©borde, 
Ă” Dieu, ta misĂ©ricorde 
Surpasse mes iniquitĂ©s: 
Pour moi, Seigneur, j’implore tes bontĂ©s. 
 
Thrène XIX Le songe
Bien avant dans la nuit la douleur de ma perte 
Tint mon corps en Ă©veil et ma paupière ouverte. 
Vers l’aube seulement le sommeil paresseux 
De son aile noirâtre a caressĂ© mes yeux. 
AussitĂ´t devant moi ma mère s’est montrĂ©e, 
Tenant entre ses bras mon Ursule adorĂ©e. 
Elle venait ainsi chercher son chapelet 
Quand ma voix de son lit le matin l’appelait. 
C’est bien son vĂŞtement blanc, ses boucles soyeuses 
Et ses yeux souriants et ses lèvres joyeuses. 
Je regarde et j’attends. Ma mère parle ainsi: 
«Dors-tu, Jean? ou ton cĹ“ur nourrit-il son souci?» 
Alors en soupirant, de mon sommeil, je pense, 
Je m’éveillai. Ma mère après un court silence 
Continue en ces mots: «Ton chagrin Ă©ternel 
Jusque vers toi, mon fils, m’a fait venir du ciel. 
J’arrive de bien loin; et tes larmes amères 
Ont pĂ©nĂ©trĂ© des morts les demeures dernières. 
Je t’apporte ta chère Ursule entre mes bras; 
Peut-ĂŞtre l’ayant vue encore, tu voudras 
Calmer ton dĂ©sespoir, mon fils, car il t’enlève 
Tes forces, et ta vie avant le temps s’achève, 
Ainsi que lentement se consume un flambeau: 
Chaque heure en s’écoulant t’approche du tombeau. 
Et quoi donc? Pour toujours nous croyez-vous perdues, 
Lorsqu’au sĂ©jour des morts nous sommes descendues? 
Non, crois-moi, nous vivons plus que vous dans le ciel, 
Car plus noble est l’esprit que n’est le corps mortel... 
Terre, le corps retourne Ă  la terre, et notre âme 
Ne remonterait pas au ciel qui la rĂ©clame? 
Laisse-lĂ  cette crainte et n’ose plus douter 
Que ta fille jamais ait cessĂ© d’exister. 
Elle se montre ici sous une forme humaine 
Pour se faire de toi reconnaĂ®tre sans peine; 
Mais parmi les esprits et les anges des cieux 
Comme une blanche aurore elle brille: avec eux 
Ă€ Dieu pour ses parents elle dit sa prière, 
De mĂŞme qu’ici-bas elle faisait naguère; 
Que si ta douleur vient de ce qu’elle a quittĂ© 
La terre, dans sa fleur, avant d’avoir goĂ»tĂ© 
Aux plaisirs de ce monde, oh! qu’ils sont vains et vides 
Vos plaisirs! Après eux, entre vos mains avides 
Que reste-t-il, sinon un peu plus de douleur? 
Tu peux le voir, mon fils, par ton propre malheur. 
Ta fille, n’est-ce pas? t’a donnĂ© bien des joies: 
Mais peut-on comparer au deuil oĂą tu te noies 
Aujourd’hui, le bonheur dont tu jouis jadis? 
Tu ne le prĂ©tends pas. Crois-en donc, Ă´ mon fils, 
Ton propre sort. Pourquoi gĂ©mir, si de bonne heure 
La mort a pris ta fille au père qui la pleure? 
Elle a quittĂ© non pas le plaisir, mais l’ennui, 
Le travail, le chagrin, les douleurs, le souci. 
Car le monde est si plein de douleurs et de larmes, 
Que si la vie humaine a parfois quelques charmes, 
Ils perdent leur saveur dans ce mĂ©lange amer 
Comme l’eau d’un ruisseau perd son goĂ»t dans la mer. 
Que pleurons-nous, grand Dieu? Qu’elle n’ait pas peut-ĂŞtre 
AchetĂ© par sa dot le rude joug d’un maĂ®tre? 
Qu’elle n’ait pas souffert de ses emportements? 
Subi la maladie et les enfantements? 
Appris comme sa mère, un jour, la malheureuse, 
Qu’on ne sait des douleurs quelle est la plus affreuse 
De mettre un fils au monde ou de l’ensevelir? 
VoilĂ  Ce dont sa vie aurait pu s’embellir! 
C’est au ciel qu’on jouit des plaisirs vĂ©ritables, 
Des plaisirs sans mĂ©lange, assurĂ©s et durables. 
LĂ -haut sont inconnus vos peines, vos tracas; 
Les revers, les malheurs ne nous atteignent pas. 
Des maux, de la vieillesse on brave les alarmes, 
On n’y voit pas la mort qui se nourrit de larmes. 
La vie est Ă©ternelle, Ă©ternel le bonheur; 
De la terre et du ciel nous contemplons l’auteur. 
Le soleil en tous temps nous luit et nous Ă©claire, 
La nuit ne vient jamais Ă©teindre la lumière. 
Nous voyons pleinement Dieu dans sa majestĂ©, 
Lui que de votre corps voile l’obscuritĂ©. 
Vers lui tourne ton cĹ“ur et savoure d’avance 
Des plaisirs Ă©ternels la sainte jouissance. 
Tu sais ce qu’est le monde et ses affections; 
Que de plus grands objets guident tes actions! 
Ta fille, crois-le bien, a le bon lot en somme. 
Sa conduite ressemble Ă  celle de cet homme 
Qui sur la vaste mer venait de s’engager, 
Mais qui, voyant soudain paraĂ®tre un grand danger, 
Fait voile vers le port. Les autres par l’orage 
PoussĂ©s sur les Ă©cueils ont fait bientĂ´t naufrage. 
Dans les flots, par la faim, le plus grand nombre est mort; 
Bien peu sur une planche ont pu gagner le bord. 
Il fallait bien qu’un jour elle mourĂ»t, quand mĂŞme 
Elle eĂ»t de la Sibylle eu la vieillesse extrĂŞme. 
Cet assurĂ© trĂ©pas elle l’a devancĂ©: 
Par lĂ  de mille maux son sort est dispensĂ©. 
Combien Ă  leurs parents chĂ©ri doivent, survivre 
Dont la mort au malheur orphelines les livre! 
Cette autre par contrainte Ă©pouse un inconnu, 
Et le bien paternel passe au premier venu. 
Et puis, mĂŞme entre nous, les rapts ne sont pas rares; 
Mais la plupart pourtant tombe aux mains des Tartares; 
Et lĂ , dans l’esclavage, Ă´ spectacle attristant! 
Attendent dans les pleurs la mort Ă  tout instant. 
Pour ta fille ces maux, tu n’as plus Ă  les craindre, 
Puisqu’en ses jeunes ans tu vois ses jours s’éteindre, 
Avant qu’elle
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